samedi 12 janvier 2008

France - Indépendant de la dépendance

31 décembre 2007. Le compte à rebours touche à sa fin : 5, 4, 3, 2, 1… Éteignez vos clopes ! C’est la première injonction, une dernière taffe avant la bise. Et l’absence. C’est ainsi que commençait 2008, dans un ultime nuage nicotineux, entre les quatre murs de cafés délaissés – eux aussi – par leurs chères et tendre épouses. Plus de fumée, et plus de feu. Certains veulent mettre fin à leur dépendance ; d’autres préfèrent s ‘en accommoder.




Pour le général De Gaulle, avec la télévision, « la politique entre dans la salle à manger ». Aujourd’hui, c’est la cuisine qui rentre dans la télé. Entre discours et nouvelles conquêtes, entre rumeurs et annonces officielles, entre l’Élysée et Disneyland, Nicolas Sarkozy est devenu un indépendant de la dépendance. Depuis 60 ans, pour faire de la politique, il faut dompter les caméras. Celui qui ne passe pas à la télé reste dans un anonymat lancinant et l’autre, le maître cathodique est projeté dans l’univers de la vie publique.




Mieux, actuellement, la présidence et le petit écran sont à la limite de la symétrie : Sarkozy et son portable, Delarue et son oreillette. Sarkozy et ses sondages, Nikos Aliagas et ses votes du public. Sarkozy et son refus de la négation (« c’est pas possible »), reflète les approximations langagières télévisuelles. Mieux encore, Sarkozy reprend à souhait les termes journalistiques surexploités, ainsi a-t-il parlé de « prise d’otage » pendant les grèves de novembre.




Plus que de connivence, il s’agit d’un renversement. Quels journalistes (j’inclus ici ceux de Pandore) peuvent se passer de Nicolas Sarkozy ? Aucun. Un peu comme si une cigarette était en manque de son fumeur. C’est encore plus fort qu’un subtil contrôle de la presse, plus génial qu’une campagne propagandiste, c’est une façon de dépasser un besoin, de chambouler une hiérarchie. C’est une rupture.

"La présidence et le petit écran sont à la limite de la
symétrie"


Voilà pourquoi le système d’information est au diapason de l’Élysée, parce que le chef de l’État est la dose quotidienne dont dépendent les journaux, les radios, les télés, les sites Internet, et les autres. Et, en plus de satisfaire cette addiction, le président abreuve les Français. Par sa présence constante, il illustre son volontarisme, sa détermination sans faille qu’il est de bon ton de mettre en avant, en prévision de chiffres moins flatteurs qu’annoncés. Il n’a pas encore de résultats, mais il se bouge. En tirant profit de son lien essentiel à la presse, en inversant l’ordre théorique de la dépendance, il sort renforcé de tous les côtés. Le stratège implacable et le conseiller en communication diabolique coexistent en une même personne. Ils sont devenus indissociables.




Sarkozy aime les médias, les médias ont besoin de Sarkozy. La réciprocité n’existe plus, supplantée par un dualisme nouveau dans les plus hautes sphères de l’État : l’amour face à la nécessité.



L.A





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