C’est l’histoire d’un mariage entre vice et vertu. Depuis sa création en 1861, l’Etat italien s’est caractérisé par sa bilatéralité en termes de valeurs traditionnelles. D’une part, l’Italie a toujours assumé son héritage Chrétien, avec un Vatican particulièrement actif au sein de Rome ; de l’autre, l’Italie reste la capitale du crime organisé, un phénomène qui touche aujourd’hui le monde entier. Preuve en est que “mafia” fait partie de la longue liste de mots que l’italien a donné à une multitude d’autres langues à travers le globe. L’histoire de l’Italie est donc l’histoire d’un pays à la fois ancré dans la religion, mais qui ne peut se séparer d’une organisation caractérisée par le mensonge, le vol, le meurtre.
John Dickie, auteur du best seller Cosa Nostra, a history of the Sicilian Mafia, explique ce paradoxe en remontant la genèse de la mafia à la création même du Royaume Italien. La mafia italienne naît dans les rues de Palerme, où les fameuses ‘Chemises Rouges’ de Garibaldi se mesuraient aux défenseurs du Royaume de Naples, qui possédait alors la Sicile entière. Le 7 juin 1860, lorsque les troupes vaincues du royaume devenu archaïque se retirent, Palerme devient officiellement une ville italienne, unifiant la Sicile au reste de la péninsule Italienne. Cependant, si la plupart des historiens considèrent la campagne unificatrice de Garibaldi épique, le résultat n’en resta pas plus qu’une légende.
Suite à l’unification, les ministres du royaume, tous venant des riches régions du Nord, telle la Lombardie, avaient espéré trouver en Sicile des conservateurs visant la démocratie et la croissance économique. Malheureusement, il ne s’agissait que d’un espoir déchu, et le gouvernement trouva en Sicile, soit des républicains révolutionnaires accoutumés au mécontentement politique ; soit des aristocrates regrettant le Royaume de Naples ; soit des politiciens sans scrupule profitant du renversement politique pour accéder au pouvoir. Ainsi, lorsque le gouvernement refuse d’inclure les siciliens dans l’élite politique, il n’est pas surprenant que la violence caractérisant la révolution de 1860 renaisse. Cette violence fut menée en premier lieu par un Garibaldi abattu par le véritable gouffre qui se trouvait entre la Sicile et la péninsule italienne, contre lequel il s’était battu pendant toute la période du ‘Risorgimento’ ; Une révolte qui fut tout de suite arrêtée et étouffée par le gouvernement, ce qui se traduisit par la mise en place de lois martiales sur l’île insurgée.
L’Histoire du monde nous a assez montré que les régimes autoritaires ne font autre qu’encourager la révolte, et le cas de la Sicile n’en fut pas une exception : son instabilité se traduisit par la montée en puissance d’organisations criminelles, qui afin d’atteindre le pouvoir auquel les siciliens aspiraient, et échapper au à la précarité, se donnaient à des activités criminelles, comme le trafique d’armes, de drogue, entre autres. Même lorsque, à partir de 1976, la Sicile s’intégra dans la péninsule italienne, ces organisations survécurent, et c’est ainsi que naquit un des phénomènes les plus combattus au monde : la mafia.
Aujourd’hui, en Italie, la mafia est d’autant plus combattue qu’elle crée de plus en plus de problèmes, gelant la politique italienne. En effet, l’économie souterraine de l’Etat Italien représentant près de 25% de son PIB, la mafia est aujourd’hui impliquée dans le trafique des déchets par exemple, dont résultat est clair à Naples, et dans la corruption des politiciens, ce qui pose de gros problèmes quant à la démocratie. En vie depuis plus près d’un siècle et demi, la mafia est aujourd’hui devenu une mauvaise herbe : Son ancrage dans la société italienne est telle, qu’on a beau l’arracher, elle continue à repousser.
dimanche 10 février 2008
La mafia, ou l’héritage du Risorgimento
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